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Moustapha DIA, président des acteurs de la filière lait : ‘L’amélioration génétique du cheptel ne nous a rien apporté’

La rareté du produit sur le marché international devrait représenter une opportunité pour les producteurs locaux de lait. Telle est la conviction de Moustapha Dia, le secrétaire général de la Fédération nationale des acteurs de la filière lait qui, dans l’entretien qu’il nous a accordé, apporte des solutions idoines pour le développement de la filière lait au Sénégal et surtout pour la diminution de la facture laitière

Publié le 17 avril 2008

Wal Fadjri : Président de la Fédération nationale des acteurs de la filière lait, comment réagissez-vous face au coût de plus en plus élevé du prix du lait au Sénégal ?
Moustapha Dia : La filière lait doit se ressaisir, car la hausse et la rareté peut progressivement continuer. Mais elle représente aussi une opportunité pour le producteur local de mettre son produit sur le marché et de manière accessible. C’est dans ce cadre que nous avons organisé des journées de réflexions qui ont abouti à l’élaboration d’un projet intitulé Prodlait (projet de développement laitier), qui n’est cependant pas effectif, car certains membres ne sont pas encore d’accord sur les points essentiels. Ces points ne pourront être définis qu’avec l’accord de tous les membres de la fédération.

Wal Fadjri : Pourquoi ces divergences entre acteurs de la filière lait ?
Moustapha Dia : Le projet tel qu’il a été conçu, exclue les producteurs locaux. Il vise à créer un nouvel éleveur dit moderne. Et ce genre de modernisation que veulent nous imposer les autorités, pose problème. Nous avons établi une conception de la modernisation de l’élevage avec une certaine amélioration du système qui répond au contexte actuel (socio-économique, écologique, climatique..). Ce qui nous fait penser que nous sommes dans une dynamique de modernisation. Cependant,

l’Etat persiste à vouloir nous faire adopter une autre forme de production que nous n’arrivons pas à maîtriser, car elle ne convient pas aux facteurs de production dans le Sahel. Parce que nos domaines d’élevage restent marqués par le climat sahélien incontrôlable, le pâturage est tantôt abondant, tantôt rare et l’eau n’est pas encore maîtrisée. Mais, l’Etat nous propose de créer des fermes autour desquelles nous allons faire des cultures fourragères. Cependant, ces cultures auront un problème d’accès à l’eau. Parce que même au niveau de la vallée où nous pensons que l’eau est abondante, nous éprouvons des difficultés pour faire de la production. C’est dire que, dans la zone sylvo-pastorale où la nappe est beaucoup plus profonde, nous n’arriverons jamais à faire ce genre de culture. Nous considérons ces propositions comme des rêves irréalisables. Il existe des solutions plus adaptées à notre système pour développer l’élevage au Sénégal. Nous nous opposons catégoriquement à l’importation des races exotiques qui ne s’adapteront jamais à notre climat et à nos conditions d’élevage du fait de la rareté de l’eau. En dehors de cela, il y a le côté financier qui pose problème. La génisse européenne nous revient à un million de francs Cfa là où la génisse sénégalaise ne peut pas dépasser cent cinquante mille francs. Les modes de modernisation préconisés par l’Etat sont irrationnels pour des éleveurs qui ont des moyens limités.
Wal Fadjri : Seriez-vous contre l’amélioration génétique du cheptel sénégalais ?

Moustapha Dia : Quelques-uns parmi nous font de l’amélioration génétique. C’est une expérience qui est en vigueur depuis plus de quarante ans et qui n’a rien apporté. Parce que nos conditions climatiques ne le permettent pas. A cause de cela, les sujets européens perdent beaucoup de leur qualité en arrivant dans le pays. Et à partir de ce moment, ils ne valent pas mieux que ceux d’ici. Notre race de cheptel est apte à la transhumance, à la fin et à la soif. Nos bovins peuvent rester plus de deux jours sans paître, encore moins s’abreuver, contrairement à la race européenne qui mange toutes les heures. Pour ce qui nous concerne, nous avons décidé de nous baser sur les moyens du bord pour développer l’élevage, sans pour autant faire appel à l’exportation de technologie et de cheptel étranger. Avec les réalités de notre milieu, nous sommes aptes à améliorer notre système d’élevage.

Source : walf du 02 avril 2008

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